Histoire du village de Madiran indissociable de celle du Madiran

 La création du village est intimement liée à celle de l’abbaye de Madiran, nom probablement déformé de Marie, patronne du lieu.

 Le village traverse les grands événements du Moyen Age, et en particulier la guerre de Cent Ans, puis les guerres de Religion. L’église conserve encore aujourd’hui les stigmates des destructions anglaises : en 1569, l’armée de Montgomery  détruit par le feu une bonne partie de l’église abbatiale. On voit encore les pierres rougies par le feu en arrivant prés du porche. Les madiranais mirent 30 ans à la reconstruire.

 La vigne est un des éléments clés de la vie locale. Au XVIe siècle, les vignes sont alignées en rangées, elles sont « échalassées » et entourées de haies.

Au XVIIe, avec la Renaissance, des novations techniques voient aussi le jour. On essaye ainsi des «  piquepouls », c’est-à-dire de la vigne basse.

A cette époque, paradoxalement, le rouge est peu présent, sauf, hors zone, vers St Mont, Riscle et Lupiac

Au XVIIIe, le rouge se développe, à la faveur de nouveau mode de conduite en hautin qui représente rapidement 50% des modes de culture de la vigne. Ne plus faire de la vigne basse est alors synonyme de meilleure qualité.

 C.Dralet affirme alors « les vins de Madiran étaient produits par les vignes hautes, sur quoi il est à remarquer que celles qui sont en espalier, sur un terrain caillouteux, donnent le vin le plus précieux, connu sous le nom de vin de primeur ».

 L’encépagement de l’époque

Il faut se référer à l’enquête de l’intendant de Guyenne Dupré de St Maur en 1783-1784. Ce qui est alors remarquable, c’est le petit nombre de cépages rencontrés.

En rouge, on n’en rencontre que deux, ce qui est alors gage de qualité car on vendange alors à mâturité ;

-          le tanat « un raisin noir, sa feuille est ronde, peu piquée et de couleur rouge ». Il est probablement alors d’introduction récente (vers 1700 ?) car il correspond mieux aux labours modernes et à un besoin d’augmentation de la productivité de la vigne.

-          le mansenc, « ce raisin est un peu plus noir que le précédent, sa feuille moins rouge est plus piquée ». On l’appelle alors parfois teinturier, car il permet d’avoir un vin « noir » dont sont demandeurs les principaux clients des vins de Madiran, les consommateurs des vallées pyrénéennes.

 D’autres cépages se rencontreront au XIXe : Crouchen, malbec, queue-forte, crouahort, grand piec, peit piec

 Le commerce du vin

Il est essentiel pour la vie locale, mais contrairement aux légendes (le vin de Madiran à la table des rois d’Angleterre par exemple…), il se fait aussi surtout à l’échelon local.

Un fort protectionnisme existe alors. Par exemple en Béarn, un privilège empêche la vente des vins « étrangers » avant que ceux du pays n’aient été consommés. Ceci sans parler des nombreux droits et taxes qui existent.

 

Au XVe siècle se développe un commerce du vin vers les Pyrénées (Lourdes, Tarbes, Bagnères) comme l’atteste de nombreux comptes consulaires. Ceci est à relier avec la faiblesse du vignoble du piémont pyrénéen et la complémentarité naturelle qui se créé, ces régions étant exportatrices de bois.

Des marchands professionnels se chargent d’approvisionner les tavernes municipales, principal lie de débouché.

A noter que le millésime n’existe pas encore, on ne vend que du vin de l’année.

 

Au XVIIe siècle, les exportations se développent : le Pacherenc vers la Hollande, le Madiran, outre la destination traditionnelle des Pyrénées, vers « les Antilles ».

Pour finir de tordre le cou à la légende, Francis Brumont dans son ouvrage de référence cite les volumes de Madiran observés au port de Bayonne à destination de l’Angleterre entre 1746 et 1780 : 600 barriques soit 0,1% du trafic !

 

Le vin de Madiran ,en tant qu’appellation, est cité pour la première fois en 1744, dans un règlement des échevins de Bayonne. Ce développement n’a pu avoir lieu qu’à cause d’une amélioration de la qualité des vins et d’une meilleure conservation.

 

 

En 1750, alors qu’il s’agit face à ce développement des échanges de tracer une nouvelle route entre Aire et Tarbes, la pression du village, allié à des voisins comme Viella, permet d’imposer un tracé qui passe à Madiran, assurant ainsi l’essor économique.

Mais le développement des échanges va aussi amener des concurrents : Bergerac, Tursan d’où une petite crise fin XVIIIe

 

De ces relations privilégiées avec les Pyrénées, on comprend mieux qu’au moment de la définition des

départements, Madiran demande son rattachement aux Hautes Pyrénées.

 

Au début du XIXe siècle, le Madiran est déjà un vin de longue garde grâce à ses tannins. En 1816, un client réclame à son négociant bayonnais une barrique de 1802 ! Même si la consommation augmente, le principal débouché demeure tout de même les Pyrénées.

 

Au XIXe, le vignoble va voir sa superficie légèrement progresser jusqu’au milieu du siècle, puis décliner lentement suite aux crises de l’oïdium (1854) et du mildiou (1860) ; Les traitements deviennent lourds pour les producteurs et l’oïdium a surtout frappé les vignes de qualité, ce qui a profité aux concurrents (Languedoc).

Les échanges se développent dans tous les sens avec le chemin de fer. Des premiers envois vers Paris ont ainsi lieu.

 

Un coup terrible est l’arrivée du phylloxera à partir de 1890. La production est laminée. La seule solution qui est trouvé est de tout replanter en pied greffé sur des supports de vigne américaine. Les autorités attribuent 1000 pieds greffés par producteur en 1900,ce qui n’est pas forcément suffisant.

A cette occasion, le tannat devient majoritaire.

 

La quête de qualité amène au tournant du Xxe siècle à créer le concept d’appelation

En 1907, la commune de Madiran souhaite se réserver l’exclusivité d’une appellaton « Madiran ». Pour bénéficier de la loi de 1905 sur les applellations, un premier projet d’aire, très restreinte, est proposé par la commune à l’initaive du maire Ludger NABONNE, par ailleurs également président du syndicat des viticulteurs du Madiranais fondé en 1906.

 

Une commission officielle de délimitation du madiranais est institué par décret du 23 décembre 1909. Ludger NABONNE fait valider une aire restreinte par la commission et le préfet.

 

Dans cette logique, M. Laburthe à Maumusson généralise en 1920 sa mise en bouteille après 3 ans de vieillissement en tonneaux.

 

En 1935, un décret loi institue les appelations contrôlées Le syndicat des viticulteurs présidé par Bernard NABONNE (le fils de Ludger, par ailleurs propriétaire du château d’Usseau) fait alors une demande conjointe avec le syndicat viticole du vic bilh (qui ne se qualifiait pas encore de pacherenc) en 1942, après la perte d’une demande isolée en 1940.

 

Cette demande est retenue en 1948. Un annuaire des producteurs est élaboré repertoriant une centaine d’entre eux sur 30 communes.

 

Par décret du 2 septembre 1966 , Viella sera intégré à l’appelation (et St Mont refusé). Non pas que les vins ne valaient pas l’intégration à l’origine, mais la rivalité entre les deux villages, le poids de Viella qui aurait contrebalancé l’influence de Madiran, et bien d’autres raisons avaient expliqué cette bizarrerie.

 

Le décret de 1948 impose des critères de qualités garants de l’appellation :

-          rendement maximum de 25 hl/ha (55 en 1992)

-          vieillissement en fût de 33 mois minimum, ce qui expliquera les difficultés au départ à produire du Madiran 54 producteurs en 1949), car il faut avoir la trésorerie pour attendre et stocker. La durée sera progressivement abaissée et les cuves tolérées. (24 mois en 1959, 20 en 1962, 12 en 1966)

-          la proportion de tannat ; entre 30 et 70% en 1948. 30 et 50 en 1966, 40 et 60 en 1997 (mais quel statut pour les 100% tanat aujourd’hui bien courants ?)

-          Une date limite de mise sur le marché du millésime : pas avant le 1er novembre de l’année qui suit l récolte (décidé en 1987)

 

Le Madiran va montrer son souci de qualité. Ainsi entre 1940 et 1951 un ingénieur et un technicien contrôle la qualité de tous les vins sortis des chais pour donner le visa syndical.

La première cave coopérative est fondée à Diusse en 1936 par sabin Oulié

En 1948, des propriétaires de Viella crééent la cave de St Mont. L’entrée de Viella dans l’appellation en fera un des premiers producteurs de Madiran. En 1950 est fondé celle de Crouseilles par des Madiranais